Etat des lieux sur le botulisme humain en France, entre 2013-2016

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Une étude de Santé Publique France, publiée dans le dernier Bulletin épidémiologique hebdomadaire, dresse un état des lieux de la situation du botulisme humain en France sur la période 2013-2016, à partir de données épidémiologiques et des investigations biologiques du CNR.

Par Steven DIAI, publié le 06 février 2018

Etat des lieux sur le botulisme humain en France, entre 2013-2016

Le botulisme humain est une affection neurologique rare mais grave, qui fait l’objet d’une déclaration obligatoire depuis 1986 à Santé publique France. Elle se caractérise par des paralysies flasques descendantes. Elle est due à des neurotoxines botuliques qui sont divisées en sept types (A à G), selon leurs propriétés immunologiques, et en sous-types sur la base de leur analogie de séquences d’acides aminés. Les Clostridium producteurs de neurotoxines botuliques, C. botulinum et les souches neurotoxinogènes de C. butyricum et C. baratii, sont très hétérogènes d’après leurs caractères phénotypiques, physiologiques et génétiques. Ces Clostridium peuvent se développer dans les aliments, notamment ceux qui sont non acides et qui n’ont pas subi de traitement thermique suffisant.

Au cours de la période 2013-2016, 39 foyers de botulisme regroupant 67 cas et 3 foyers suspects (4 cas) ont fait l’objet d’exploration biologique et ont été déclarés aux autorités sanitaires, selon Santé Publique France. Une suspicion de botulisme a également été portée sur la base de signes cliniques évocateurs de botulisme, malgré des recherches négatives en toxine et C. botulinum dans des échantillons biologiques et alimentaires. Les nombres de foyers et (cas) variaient de 4 (11) à 14 (21), avec une incidence annuelle du botulisme de 0,18/106 à 0,33/106.

Crédit photo : Santé Publique France

Trente-neuf foyers de botulisme confirmés (68 cas) et trois suspects (4 cas), ont été identifiés : 6 foyers de type A (10 cas), 26 de type B (47 cas), deux de type F (5 cas) et cinq de type indéterminé (6 cas). Le botulisme alimentaire concernait 36 foyers (6 cas) et le botulisme infantile a été confirmé chez 6 nourrissons. Tous les cas de botulisme alimentaire de type A et F étaient des formes sévères. Deux décès en lien avec une intoxication botulique ont été enregistrés pour cette période. Les foyers observés étaient distribués dans toute la France.

Crédit photo : Santé Publique France

Origine de l’infection

L’aliment responsable a été identifié dans 15 foyers parmi les 36 foyers de botulisme alimentaire. Il s’agissait majoritairement de produits de charcuterie de préparation familiale ou artisanale, jambon cru notamment, à l’origine de 13 foyers de botulisme de type B dont 3 étaient dus à des charcuteries importées. Des charcuteries de préparation familiale ou artisanale ont été suspectées dans 12 autres foyers. Un pâté de faisan a été mis en cause dans un foyer de type A et une consommation de conserves d’asperges a été suspectée responsable de 2 autres foyers. Un des 2 foyers de botulisme de type F était dû à une viande hachée d’origine industrielle contaminée par Clostridium baratii F7. Aucun aliment n’a été identifié être à l’origine des cas de botulisme infantile, mais une contamination environnementale a été suspectée chez 3 d’entre eux. Une souche de C. botulinum A2 résistante aux pénicillines et au métronidazole a été identifiée dans un cas de botulisme infantile avec rechutes.

Explorations biologiques chez les patients atteints de botulisme alimentaire

Le diagnostic biologique est réalisé par le Centre national de référence (CNR) des bactéries anaérobies et du botulisme (Institut Pasteur, Paris). Le diagnostic biologique repose sur la mise en évidence de toxine botulique dans le sérum des malades à l’aide du test biologique chez la souris. La recherche de toxine botulique ainsi que de spores et/ou de formes végétatives de C. botulinum peut être réalisée sur un échantillon de selles, notamment en présence d’une forme de toxi-infection botulique. La détection de C. botulinum est effectuée par culture d’enrichissement et analyse par PCR ciblée sur les gènes codant les neurotoxines botuliques. La bactérie et sa toxine peuvent également être recherchées dans des aliments suspects d’être à l’origine d’intoxications botuliques.

Parmi les 56 échantillons de sérum de patients avec un botulisme alimentaire (hormis les cas de botulisme infantile, les cas de suspicion et cas de botulisme indéterminé), la toxine botulique a été détectée dans 44 (79 %) d’entre eux. Dans la majorité des cas (68 %), le titre en toxine botulique était compris entre 1 et 8 doses létales souris (DLS)/mL. Plus rarement (7 %), le titre était plus élevé, de 16 à 40 DLS/mL.

Parmi les 70 patients observés durant la période 2013-2016, les signes cliniques les plus fréquemment rapportés, selon Santé Publique France, étaient : paralysie oculomotrice (90 %), notamment diplopie (55 %), paralysie laryngée avec en particulier dysphagie (75 %), sécheresse de la bouche et constipation (65 et 59 % respectivement). Une paralysie des membres et du diaphragme a été rapportée dans 38 % et 28 % des cas, respectivement. Les signes digestifs tels que nausées, vomissements, diarrhée ont été observés dans 23 à 33 % des cas. Cinquante-quatre cas (75 %) ont été hospitalisés, dont 20 (37 %) ont nécessité une réanimation avec ventilation assistée. Deux patients sont décédés en 2015 et 2016, en relation avec une intoxication botulique de type A2 et B4 (C. botulinum B non-protéolytique), respectivement.

En France, le botulisme reste une maladie rare avec 11 à 22 cas annuels (18 en moyenne) survenus dans la période 2013-2016. Cependant, il est considéré comme une maladie sévère par Santé Public France, car il nécessite l’hospitalisation de 75 % des patients, le plus souvent en service de réanimation. Ainsi, le maintien de sa surveillance apparaît comme étant nécessaire, selon Santé Publique France, « afin d’identifier précocement l’éventuelle émergence d’un nouveau type de toxine ou la mise en cause d’un nouvel aliment, comme dans le cas des deux foyers de C. baratii type F en 2014 et 2015 ». La surveillance permet aussi d’identifier rapidement des foyers afin de transmettre sans délai, aux particuliers et aux industriels, les recommandations de modification de pratiques en termes d’hygiène et de conservation des denrées alimentaires. Enfin, l’identification rapide des aliments contaminés accélère leur retrait du marché ou d’une distribution familiale.

La rédaction

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