CNAMTS : Bilan à 4 ans de la Rémunération sur objectifs de santé publique

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Après 4 ans de mise en œuvre, le bilan de la Rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) témoigne de l'intérêt du dispositif comme levier d'évolution des pratiques chez les plus de 110 000 médecins libéraux éligibles. [1]

Par Steven DIAI, publié le 28 avril 2016

CNAMTS : Bilan à 4 ans de la Rémunération sur objectifs de santé publique

Entre 2011 et 2015, la Rosp a encouragé une prise en charge améliorée des malades chroniques et une prescription plus pertinente et efficiente au service de la maitrise des dépenses de santé ; de plus, elle a agi comme levier de modernisation du cabinet médical, pour le bénéfice des patients. Le taux d’atteinte global pour les médecins généralistes et les médecins à expertise particulière est passé de 52,9 % à 68,3 % [2] entre 2012 et 2015. Seul bémol, les indicateurs du volet prévention ne progressent pas.

Introduite par la convention médicale signée en juillet 2011, la Rosp, élément socle de la diversification des modes de rémunération des médecins fondée sur l’atteinte d’objectifs de santé publique, s’organise autour de 3 axes : 1/ faire progresser la qualité des soins aux patients chroniques et la prévention ; 2/ renforcer l’efficience des prescriptions ; 3/ moderniser et simplifier les conditions d’exercice. Elle est évaluée annuellement pour les médecins traitants, les cardiologues et les gastroentérologues sur une série d’indicateurs cliniques relatifs au suivi des maladies chroniques, à la prévention, à la prescription de médicaments. Un volet de la rémunération relatif à l’organisation du cabinet est par ailleurs ouvert à tous les médecins.

A l’heure des négociations en vue de la signature de la prochaine convention médicale, l’analyse des résultats observés en 2015 permet d’établir un bilan à quatre ans de ce dispositif et de son impact sur les pratiques des médecins et d’identifier les évolutions qui pourraient y être apportées. Après 4 années de mise en œuvre, le bilan apparaît globalement positif.

En premier lieu, l’amélioration continue du taux d’atteinte des objectifs confirme le rôle mobilisateur de la Rosp pour faire évoluer les pratiques. Depuis 2012, le taux d’atteinte des objectifs pour les médecins généralistes et les médecins à expertise particulière a progressé au global de + 15,4 points.

Un effet levier confirmé par les médecins

Ces résultats rejoignent le ressenti des médecins eux-mêmes, puisque selon une étude menée par l’institut BVA fin 2015 [3], une majorité significative et croissante d’entre eux reconnaît désormais à ce dispositif conventionnel un impact réel sur l’évolution de leurs pratiques.

Sur l’ensemble des objectifs fixés dans le cadre de la Rosp, les médecins interrogés sont 86 % à déclarer avoir fait évoluer leurs pratiques pour l’optimisation des prescriptions avec le recours à des médicaments génériques (vs 77 % en 2013 lors de la première vague de l’étude, soit + 9 points), 88 % pour l’informatisation du cabinet avec la tenue de dossiers médicaux informatisés et l’utilisation des télé-services de l’Assurance Maladie (vs 81% en 2013, soit + 7 points), 87 % pour la prévention avec des indicateurs de vaccination contre la grippe, de dépistage des cancers (vs 79 % en 2013, soit + 8 points) et 91 % (vs 81% deux ans plus tôt, soit + 10 points) pour le suivi des pathologies chroniques avec des indicateurs de bonne pratique relatifs aux patients atteints de diabète ou d’hypertension artérielle.

Plus en détail, l’analyse des résultats par indicateurs depuis 2012 montre que les pratiques des médecins généralistes et des médecins à expertise particulière évoluent dans le bon sens sur la grande majorité des indicateurs.

Les résultats par volet

Sur les 19 indicateurs cliniques calculés, les pratiques de ces médecins ont évolué favorablement pour 15 d’entre eux. Sur la période, seuls 4 indicateurs sont mal orientés.

La Rosp a contribué activement à l’efficience globale du système de soins, avec l’atteinte des objectifs sur 5 des 7 indicateurs observés (avec par exemple une progression des prescriptions dans le répertoire des médicaments génériques). Des progrès significatifs sont également observés dans le suivi des maladies chroniques et sur la prévention des risques iatrogènes.

Au regard de la progression observée depuis 2011, on peut évaluer [4], qu’en 2015, près de 277 000 patients diabétiques supplémentaires ont pu bénéficier des dosages d’hémoglobine glyquée recommandés (progression de +8,7 points) et que 87 000 patients diabétiques à haut risque cardiovasculaire supplémentaires ont été mis sous traitement par statine et par aspirine faible dosage ou anticoagulant en 2015 (progression de +7,2 points). Selon cette évaluation, la prescription de benzodiazépines aurait par ailleurs été évitée à environ 381 000 patients, suite à une baisse de 3,7 points de la part des patients de plus de 65 ans traités par benzodiazépines à demi-vie [5] longue depuis 2011.

Les progrès observés en matière de prescription d’antibiotiques sont également très encourageants avec une baisse de 6,1 points constatée depuis 2011. Pour l’année 2015, cette progression représente environ 1 805 000 prescriptions évitées.

Si les indicateurs concernant la prévention ne sont pas tous bien orientés, la Rosp a permis de faire évoluer les pratiques de vaccination et de dépistage des cancers féminins qui se stabilisent en 2015, après un recul observé entre 2012 et 2014. Il s’agit d’un signal encourageant qui devra être prolongé dans le cadre de la prochaine convention médicale, conformément aux orientations données par le ministère de la Santé. Il démontre que la mobilisation convergente de tous les acteurs (pouvoirs publics, autorités de santé, professionnels de santé et patients) est indispensable pour faire évoluer durablement les pratiques dans ces domaines.

Les rémunérations versées pour l’année 2015

Cette amélioration globale des pratiques, observée sur l’ensemble du territoire et des volets du dispositif, s’est accompagnée d’un complément de rémunération annuel, en progression au fil des années. En 2015, en moyenne 4 514 euros ont été versés aux 89 489 médecins concernés (contre 4 215 euros en 2014, soit + 7,1% par rapport à 2014). Parmi eux, les 57 045 médecins généralistes et médecins à expertise particulière ont perçu une rémunération moyenne annuelle de 6 402 euros (contre 5 935 euros en 2014, soit + 7,9 % par rapport à 2014). Au total, l’ensemble de la Rémunération sur objectifs de santé publique représente une dépense brute de 404 millions d’euros pour 2015 (vs 377,4 millions en 2014), entièrement provisionnée dans l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie.

Sources :

1 Afin de disposer de données comparables d’une année sur l’autre, le calcul est réalisé à partir des résultats des médecins généralistes et médecins à expertise particulière éligibles à la rémunération, hors nouveaux installés et avec une patientèle Médecin traitant d’au moins 200 patients. Les mêmes critères sont pris en compte pour les seuls médecins généralistes.

2 Résultats des omnipraticiens éligibles à la rémunération, hors nouveaux installés et avec une patientèle Médecin traitant d’au moins 200 patients.

3 Sondage BVA pour la Cnamts, « Perception des médecins sur la convention de 2011 », décembre 2015. Terrain réalisé du 6 au 27 octobre 2015par téléphone auprès de 600 médecins libéraux, dont 318 médecins généralistes et 282 médecins spécialistes. Représentativité de l’échantillon assurée selon les variables de quotas de sexe, âge, région et type d’exercice (cabinet de groupe ou individuel). Question : « Pour chacun des objectifs suivants prévus dans la convention, avez-vous fait évoluer votre pratique dans le sens de ces objectifs ? ».

4 Il s’agit d’une estimation de l’impact de cette évolution calculé à partir des données 2015.

5 La demi-vie est le temps mis par une substance (médicament, noyau radioactif ou autres) pour perdre la moitié de son activité pharmacologique, physiologique ou radioactive. C’est l’indicateur utilisé en pharmacologie pour évaluer la durée d’activité d’un médicament dans le corps humain.

La rédaction