La connectomique pour déchiffrer la cartographie du cerveau

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Suite au 22e Colloque ‘Médecine et Recherche’ organisé par la Fondation Ipsen, Henry Kennedy, directeur du LabEX Cortex à l’Inserm de Lyon et Yves Christen, président de la fondation Ipsen, ont présenté une synthèse de cet événement consacré à la connectomique du cerveau.

Par Steven DIAI, publié le 12 mai 2014

La connectomique pour déchiffrer la cartographie du cerveau

« Il y a 86 milliards de neurones dans le cerveau humain, 6 milliards de neurones dans le cerveau d’un macaque et 70 millions dans celui d’une souris, explique Y. Christen. Chaque aire corticale étant caractérisée par son profil de connectivité, l’objectif est alors de découvrir comment, à partir de connexions, le cerveau est capable de mettre son corps en mouvement ou d’actionner sa pensée. »

« Le cerveau humain est l’un des systèmes les plus complexes existant sur la planète, il est impossible de le comprendre, si l’on ne prend pas la mesure de ses trillions de connexions structurelles et fonctionnelles », indique-t-il. Pour relever ce défi, des spécialistes étudient, en détails, la cartographie du cerveau à plusieurs échelles, du niveau microscopique des connexions synaptiques entre les neurones, au niveau macroscopique des connexions entre les différentes régions du cerveau, et entre le cerveau et le comportement.

Henry Kennedy est à la tête d’une équipe de chercheurs lyonnais étudiant le traitement de l’information dans les réseaux corticaux de la perception visuelle et de l’intégration visuo-motrice. Il explique : « La découverte des connexions du cerveau par imagerie se fait grâce à l’analyse de la diffusion de molécules d’eau autour et le long des axones. Mais par ce biais, nous analysons les connexions dans la matière blanche. Or, il y a l’équivalent de 10 mètres de câble dans un millimètre de matière blanche et de 40 km de câble dans 1 mm de matière grise. La majorité des connexions nous est donc invisible. » Pour étudier la matière grise, son équipe a mis en place des outils statistiques modélisant la connectivité sous-jacente à l’organisation hiérarchique du cortex. Elle explore les réseaux corticaux par imagerie via la résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) chez les primates humains et non-humains mais aussi de manière plus directe via l’injection de traceurs. L’approche comparative de ces deux méthodes permet d’en savoir plus sur l’évolution et la fonction, et de tester la précision des méthodes d’imagerie utilisées sur les humains.

Aujourd’hui, les nombreuses innovations techniques produisent d’énormes quantités de données. L’imagerie cérébrale, le séquençage du génome, les manipulations génétiques et l’immense capacité de l’informatique actuelle ont permis d’accélérer le déchiffrage de la cartographie du cerveau humain et animal permettant ainsi de mieux comprendre les fonctions du cerveau sain ou malade. De vastes projets collaboratifs tels que Human Connectome Project (coordinateur : David C. van Essen, Washington University School of Medicine, St Louis, USA) et Enigma Consortium (coordinateur : Paul Thompson, UCLA School of Medicine, Los Angeles, Etats-Unis) ont été mis en place pour corréler l’imagerie du cerveau humain avec les informations sur la génétique et le comportement, afin d’étayer les liens entre la structure cérébrale adulte et le développement, ainsi que la maladie.

Le consortium Enigma suit plus de 29 000 participants à travers le monde via l’imagerie cérébrale et le recueil de données génétiques de 125 établissements. Il examine la manière dont les facteurs de risques génétiques, tels que ceux qui ont été récemment découverts pour la maladie d’Alzheimer, Trem2 et ApoJ, perturbent et modifient le câblage cérébral et tente d’identifier quels types d’anomalies peuvent être évitées. Il réunit 125 établissements et 307 scientifiques du monde entier. Des scans de l’ensemble du génome, des IRM cérébrales et des DTI leur ont permis de découvrir des variantes génétiques qui affectent l’organisation du cerveau. Certains pourraient être prometteurs pour des traitements futurs de la neurodégénérescence.

La Fondation Ipsen

Créée en 1983 sous l’égide de la Fondation de France, la Fondation Ipsen a pour vocation de contribuer au développement et à la diffusion des connaissances scientifiques. Inscrite dans la durée, l’action de la Fondation Ipsen vise à favoriser les interactions entre chercheurs et cliniciens, échanges indispensables en raison de l’extrême spécialisation de ces professions. L’ambition de la Fondation Ipsen est d’initier une réflexion sur les grands enjeux scientifiques des années à venir. La Fondation a développé un important réseau international d’experts scientifiques qu’elle réunit régulièrement dans le cadre de Colloques Médecine et Recherche, consacrés à cinq grands thèmes : la maladie d’Alzheimer, les neurosciences, la longévité, l’endocrinologie et le cancer.

EC

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